Au centre de prévention de Fleury-Mérogis (Essonne), la surpopulation complique la vie. Pour éloigner trop de rats, le pénitencier a introduit des chats. Lors du procès de son client à Évry le 18 juillet, jour de la canicule maximale, Me Salomé Cohen a déployé une énergie phénoménale afin d’obtenir sa libération.
Considérée comme « un chef-d’œuvre architectural », la plus grande prison d’Europe abritait 3 438 détenus à la mi-juillet 2022. C’est 132 % d’occupation, mais il n’y a pas de matelas au sol pour pallier le manque de lits. Une situation « enviable », donc, au regard de l’établissement pénitentiaire d’Osny (Val-d’Oise) où 180 hommes dorment à même le sol, et du centre de Meaux (Seine-et-Marne) dont la densité carcérale atteint 177 % ( 45 matelas). Concrètement). Dans l’interview qu’il nous a accordée le 13 juillet (ici), l’Inspection générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), Dominique Simonnot, soucieux de ne pas « donner de leçons », a souligné que ces lieux doivent être décrits aux magistrats qui « » y aller trop rarement [pour qu’]ils voient ce qu’on voit ». Notamment les conditions d’hygiène et d’indignité.
Ils ne visitent pas les cellules par manque de temps, certainement pas par manque d’intérêt. Lundi 18 juillet, le procureur et les trois juges de la chambre correctionnelle 10 d’Évry-Courcouronnes ont écouté attentivement l’avocate pénaliste parisienne Salomé Cohen, démontrant ainsi leur curiosité. Sa présentation énergique a mis fin au tumulte incessant d’une salle comble; un silence de clôture accueillit ses paroles.
La douane réclame 257 664 euros aux supposés trafiquants
Les trois jeunes hommes, installés sous escorte dans le box, sont incarcérés à Fleury-Mérogis depuis le 9 juin. Deux jours plus tôt, ils avaient été interpellés pour avoir importé 1,3 kg de cocaïne en France métropolitaine depuis la Martinique et la Guyane. Espérant échapper aux contrôles à Orly, ils ont recouru à deux moyens : une « mule », qui fait l’objet d’une procédure complémentaire, et un colis envoyé à l’adresse d’un des trois prévenus. Voir l’article : Législature 2022. Campagne zéro déchet pour Jean-Pierre Vigier de Recticel. On n’en saura pas beaucoup plus car, lors d’une comparution immédiate le 9 juin, ils ont demandé un délai pour préparer leur défense et ont été incarcérés le soir même. L’affaire devait être entendue sur le fond le 18 juillet. Ce n’est qu’alors que la machine judiciaire surchauffée s’est grippée.
Depuis l’ouverture à 18h37 du procès qui n’aura pas lieu, l’administration des douanes dévoile le surcoût, salé : 257.664 euros d’amendes. Un « oh » concerté parcourt les cinq bancs où s’entassent les trois familles ; une trentaine de personnes s’imaginent bientôt submergées par les emprunts. Ils ne savent pas que ces montants exorbitants ne s’appliquent jamais.
La présidente Laurence Contios s’apprête à dénoncer les faits lorsque Me Salomé Cohen se lève : « Je demande un nouveau non-lieu car trois difficultés sont apparues. » Des difficultés ? Un euphémisme. n’est transmise à deux des avocats que le 16, 60 heures avant l’audience. Deuxièmement, les transcriptions des écoutes téléphoniques ne sont que des « extraits ». ne peut pas fonder son contre-interrogatoire sur du fluff.
« Un dysfonctionnement du service public de la Justice »
Ses collègues se joignent à la demande. Si Me Fabienne Fenart a eu l’occasion de récupérer les documents en amont, probablement parce que son cabinet est à Évry, Me Louise Vandeville du barreau de Pontoise (Val-d’Oise) n’a eu que le week-end pour survoler l’ours. Premier problème : la mise en accusation tardive exige que les suspects soient jugés dans les deux mois suivant leur arrestation. A voir aussi : Comment choisir son matelas : moelleux, dur, mémoire de forme, latex ?. L’encombrement de la juridiction d’Évry ne le permet pas. Que faire avec eux? Les libérer alors que les crimes sont passibles de dix ans de prison ?
Le procureur s’y oppose et demande que le licenciement soit annulé. Au box-office, Pierre, Paul et Luc*, 23 et 24 ans et plutôt beaux garçons, semblent aussi agités que leurs conseils. « Il faut respecter les droits de la défense », dit Vandeville. « Sincèrement, accéder à ce dossier deux jours avant de mendier, impossible ! », objecte Em Fenart. « Je suis conscient de votre charge de travail, mais quand même… » a conclu M. Cohen.
Le président, de bonne volonté, est gêné : « Ni les prévenus ni les avocats ne doivent subir une erreur de transmission, due au dysfonctionnement du service public de la Justice. Un pas vers le licenciement.
Les transcriptions sommaires demeurent : « Il nous faut le CD des cassettes du procureur », demande Me Salomé Cohen, appuyée par ses collègues. Procureur Cazalas : « Je ne l’ai pas. Juge : « Je l’ai, mais sous scellés ». » Nouveau piège procédural. Magistrats et secrétaire conviennent que s’ils ne sont pas jugés lundi, le scellé ne doit pas être brisé.
« Les odeurs pestilentielles sous le cagnard »
Le fantôme du père Ubu d’Alfred Jarry plane sur la salle d’audience : si le non-lieu est refusé, on écoutera le CD et la défense découvrira son contenu au cours du procès, ce qui est regrettable. Pierre, Paul et Luc suivent les échanges avec l’attention qu’ils porteraient à une finale de Roland-Garros. Alors que le temps passe, le président décide de délibérer à la fois sur l’ajournement et sur le maintien en détention. Voir l’article : Avant soldes, profitez de privilèges de soldes exceptionnels sur les matelas, lits Emma… (jusqu’à -50%). Par conséquent, il convient d’examiner la personnalité des trois. C’est ainsi que l’on découvre l’histoire des chats à Fleury-Mérogis.
Luc, qui est représenté par Me Cohen, n’avait jamais été incarcéré : « C’est un pauvre homme qui a reçu un paquet de cocaïne, à son nom, en échange de 300 euros. Il travaille, il a besoin de bases émotionnelles pour supporter ce qui s’est passé depuis un mois et demi. Avez-vous été à Fleury dernièrement ? Dans les cellules, il fait 38°. Il n’y a aucune chance de se mettre à l’ombre. Il faut s’accommoder des odeurs pestilentielles sous le cagnard ! Ils sont les uns sur les autres, et nous avons des chats pour attraper les rats ! Nous y sommes… Mon client veut mourir. Elle est suicidaire. Je vous en prie, laissez-le partir, il se présentera autant que nécessaire au commissariat et comparaîtra devant le tribunal. »
Le puissant plaidoyer prend fin; on n’entend que le vol du papillon qui a été installé la semaine dernière dans la salle 10a.
Me Louise Vandeville promet également que Pierre fera référence à l’assistance : « Il est papa depuis hier, voici l’acte de naissance de son bébé. Il y a beaucoup de gens qui veulent l’héberger, ils sont là, ils n’attendent que faites attention- lo. Pour autant que je sache, il n’y a aucune preuve de son implication dans la circulation. Ne le laissez pas enfermé.
De Paul, Me Fabienne Fenart dit qu’il est « très sérieux. Il est inconnu de la police, de la justice. Il a 23 ans, un travail, un foyer, toute la famille l’aidera, il ne s’enfuira pas ». contrat avec lui, il est capable de le remplir ».
Trente minutes plus tard, ils sont relâchés jusqu’au procès, qui se tiendra le 10 février 2023, avant-goût de l’embouteillage au tribunal d’Évry. Sous contrôle judiciaire, ils se présenteront deux fois par semaine au commissariat. Il leur est interdit de socialiser, de voir « la mule » et de quitter l’Ille-de-France. Le président prévient : « Si vous enfreignez ces dispositions, c’est l’emprisonnement. Il doit la liberté au dysfonctionnement. »
Les membres de la famille s’étreignent, les collègues se réjouissent, les jeunes enfants auxquels l’accès a été refusé reviennent joyeusement dans la pièce et les accusés remercient leurs avocats. Dehors, il fait encore 36°. Un peu moins que dans la cellule de Fleury.
*Les trois noms ont été modifiés