La persistance de la léthargie chez les patients souffrant d’apnée du sommeil, qu’ils soient traités ou non, augmente significativement le risque d’accidents à la maison, au travail et sur la route. Mais pour de multiples raisons, les patients concernés n’en parlent pas à leur médecin… autant de chances perdues de bénéficier de soins adaptés. Une campagne de sensibilisation menée par Alliance Apnée du Sommeil vise à y remédier.
Yeux qui piquent, paupières lourdes, bâillements… Nul besoin d’avis médical pour reconnaître ces signes : c’est l’appel de Morphée ! En termes médicaux, ce besoin de dormir s’appelle la somnolence. Bien que nous soyons tous conscients du risque associé à cette condition lorsqu’il s’agit de conduire sur de longues distances, ce n’est pas toujours le cas pour les personnes qui souffrent d’une maladie chronique appelée syndrome d’apnée du sommeil (également connu sous le nom de syndrome d’apnée-hypopnée obstructive du sommeil, ou OSAS). ). Dans une campagne de sensibilisation destinée au grand public, l’Alliance Apnée du Sommeil tient à rappeler que si la fatigue reste le premier symptôme évoqué par les patients auprès de leur médecin, la somnolence diurne excessive (SDE) se transmet souvent dans le silence alors qu’elle augmente le risque de accidents dus aux endormissements fréquents qu’elle provoque. Et cela même s’il perdure chez des patients bien soutenus par un appareil à Pression Positive Continue (CPAP) ou par une orthèse d’élévation mandibulaire.
Le syndrome d’apnées obstructives du sommeil est une maladie chronique qui touche environ 3 millions de Français selon les chiffres de la Haute Autorité de Santé. Elle se caractérise par des pauses respiratoires fréquentes et anormales ou une respiration superficielle, pendant le sommeil. Elles résultent, la plupart du temps, d’un relâchement complet ou partiel des muscles du pharynx et de la barrière respiratoire et s’accompagnent souvent de ronflements. Comme l’Inserm l’explique à ce sujet, si les murs s’effondrent complètement, le passage de l’air est bloqué et c’est l’apnée. Un système d’alerte se déclenche alors dans le cerveau, provoquant un micro-réveil qui permet l’activation d’un système neurologique réflexe. Ce dernier entraînera la contraction des muscles, l’ouverture de la trachée et la restauration du passage de l’air. Reprenez votre respiration… jusqu’au prochain obstacle. Ces pauses respiratoires entraînent une diminution du taux d’oxygène dans le sang, des micro-réveils et une fragmentation du sommeil, qui ne sont pas toujours perçus par le patient mais entraînent fatigue et léthargie.
Des patients qui restent somnolents malgré un traitement bien conduit
Mais la léthargie ne doit pas être confondue avec la fatigue, selon le Dr Marc Sapène, président de l’Alliance Apnée du Sommeil. « La fatigue correspond à la difficulté à maintenir la performance, elle se manifeste par des douleurs musculaires, des regards fixes, une raideur de la nuque. La somnolence est la difficulté à rester éveillé, avec un risque important de s’endormir ; cela est dû au manque de sommeil ou à une mauvaise qualité. Son seul traitement naturel est le sommeil, tandis que la fatigue sera corrigée par le repos. Lire aussi : Ici tout commence, en avance : le résumé de l’épisode du vendredi 29 juillet… SPOILERS. Le traitement de référence du SAHOS comprend l’utilisation de la pression positive continue (PPC) la nuit : elle permet d’éviter les pauses respiratoires et est efficace contre la fatigue et la léthargie pour la majorité des patients. Cependant, une étude montre que 13% des patients traités par CPAP restent somnolents malgré un bon traitement. On parle alors d’inertie résiduelle, qui est souvent associée à une irritabilité voire à une baisse de la libido, et dont il ne faut pas négliger les conséquences sur le plan social, familial et professionnel.
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Surtout, la somnolence qui en résulte peut augmenter les risques d’accidents de la route, d’accidents du travail et/ou de baisse des performances et augmenter l’absentéisme. « Les gens ne mesurent pas la gravité de la somnolence. « , se lamentant auprès du Dr. Marc Sapène. « Les personnes qui travaillent comme grutiers, camionneurs, pilotes d’avion ou responsables de quartiers généraux de la sécurité, non seulement prennent un risque pour elles-mêmes, mais, en raison de la nature de leur profession, mettent également en danger la vie d’autrui. » souligne l’expert. Sans aucun doute, en tête des situations les plus dangereuses se trouve la conduite automobile : selon les données de la sécurité routière, la léthargie est donc responsable d’un tiers des accidents mortels de la route. Et selon une étude réalisée auprès de personnes souffrant d’apnée du sommeil, elles présentent un risque d’accident de la route 5 fois plus élevé que la population générale. Il est heureusement précisé dans le Livre Blanc de l’Institut National du Sommeil et de la Vigilance que « plusieurs études ont montré que la prise en charge et le traitement du syndrome d’apnée du sommeil par pression positive continue restaure la vigilance et diminue le risque d’accident au volant. »
Une consultation indispensable pour rechercher la cause de cette somnolence résiduelle
Mais quand consulter ? « La somnolence est normale lorsqu’elle survient la nuit avant de se coucher, après le déjeuner, le lendemain d’une courte nuit ou dans les mois qui suivent l’arrivée d’un bébé, se souvient le Dr Marc Sapène. Il devient pathologique lorsqu’elle survient tous les jours, à à tout moment de la journée, et perturbe les activités quotidiennes. Elle doit alors faire l’objet d’une consultation médicale. Voir l’article : Cette astuce peut vous aider à vous rendormir cet hiver. » La somnolence diurne peut être évaluée à l’aide du test d’Epworth, disponible sur le site de Sleep Apnea Alliance. Ce test permet, en quelques minutes, pour établir un score de somnolence : supérieur ou égal à 10, ce score caractérise une somnolence diurne pathologique .On parle de somnolence diurne excessive qui, chez un patient traité pour un SAOS, doit conduire à des investigations complémentaires par un médecin qui se spécialise dans le sommeil.Commencer par le fait de rechercher la cause de cette léthargie résiduelle en confirmant le diagnostic et le degré de léthargie en calculant le score d’Epworth et vérifier que le traitement par pression positive continue des voies respiratoires est efficace.
Pour cela, « le médecin vérifie l’indice d’apnée/hypopnée résiduelle et s’assure que la pression est adaptée. Il peut également s’appuyer sur la polysomnographie, un examen complet du sommeil qui enregistre l’activité de mouvement du cerveau, des muscles et des yeux. « , a déclaré le Dr. Marc Sapène. Interroger le patient est également essentiel afin d’explorer d’autres voies comme la non-observance qui serait liée à une mauvaise tolérance au traitement. Ainsi, selon une étude française réalisée sur 480 000 patients et publiée en 2021, trois ans après la prescription, près de la moitié des patients ont abandonné la CPAP. L’autre piste est souvent liée à une mauvaise hygiène du sommeil : heures de coucher et de lever irrégulières, durée insuffisante, consommation d’alcool ou d’excitants… La dernière précaution consiste à rechercher d’autres causes à écarter, comme les effets secondaires d’alcool ou de certains médicaments (somnifères, anxiolytiques, antihistaminiques, myorelaxants, neuroleptiques) dépression, syndrome des jambes sans repos, maladies neurologiques ou hypothyroïdie.
Une fois ces voies explorées et éliminées, il resterait encore 6% d’inertie résiduelle sans causes identifiées, pour lesquelles il existe des traitements adaptés pouvant atténuer ce trouble aux conséquences potentiellement graves. Cependant, trop souvent, par fatalité, parce qu’ils se croient protégés par leur traitement, parce qu’ils sous-estiment les risques encourus ou parce qu’ils craignent de perdre leur emploi, les patients traités pour le syndrome d’apnée du sommeil consultent ou retardent la consultation. C’est pourquoi l’expert tient à insister sur le fait que « les personnes concernées doivent consulter leur médecin dès les premiers signes : fatigue excessive, endormissement en milieu de journée… » Autant de troubles qui n’engendrent pas de risques importants et multiples, notamment sur la route. « Leur prise en charge représente un enjeu de santé publique. « , conclut-il. A noter que la campagne de sensibilisation de l’Alliance Apnée du Sommeil vise spécifiquement à attirer l’attention des patients qui, après avoir ressenti un grand bénéfice de leur traitement CPAP, présentent à nouveau des symptômes de fatigue et de léthargie.