La cour d’appel de Versailles demande « une révision » du bureau…

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Written By Jane Legaet

Rédactrice spécialisée dans le sommeil et la literie depuis 2012

A la rentrée du tribunal, le premier président Jean-François Beynel et le procureur Marc Cimamonti ont fait part de leurs inquiétudes, notamment concernant l’instruction des affaires pénales et des services criminels en (sur)tension, mais aussi leur volonté de réformer la profession de magistrat, ainsi que les modalités de recrutement et de travail au sein des juridictions, pour rendre la profession plus attractive et plus diversifiée.

Et un de plus ! Mardi 17 janvier, la cour d’appel de Versailles a célébré sa traditionnelle audience de rentrée en présence de plus de 160 invités, dont le procureur général près la Cour de cassation François Molins, l’inspecteur général de la justice Christophe Straudo, ou encore la secrétaire générale du ministère de la justice Carine Chevrier. A cette occasion, six nouveaux magistrats et quatre fonctionnaires ont été nommés.

Cette matinée solennelle était aussi le moment idéal pour rendre hommage à Marie Truchet, vice-présidente de la Cour de justice de Nanterre décédée en octobre dernier alors qu’elle présidait une audience de probation à comparution immédiate. Pour le premier président Jean-François Beynel, il s’agit désormais de « tirer les leçons de ce drame », qui, selon lui, doit générer une « grande interrogation sur les organisations et les méthodes ». « Il reste beaucoup à faire après cet événement tragique. (…) L’heure des solutions durables est venue, a-t-il dit.

Affaires pénales : « Il nous reste 120 jours pour les audiences ! »

Jean-François Beynel a fait un bref bilan des activités de la juridiction pour l’année 2022. Une activité « soutenue », a-t-il souligné, caractérisée par une réduction des délais de traitement des affaires et des retenues. Cette tendance « très positive », s’est-il réjoui, est particulièrement visible en matière civile, où « le nombre de cas évacués dépasse le nombre de nouveaux cas », notamment en raison d’une meilleure organisation du service, d’une plus grande polyvalence et de nouveaux travaux. méthodes.

Côté pénal, en revanche, le procureur général Marc Cimamonti a déploré les difficultés à entendre les affaires pénales devant les cours d’assises et à atteindre les tribunaux correctionnels des sections de leur ressort. « En février 2022, il nous manquait 40 jours d’audiences judiciaires ou d’audiences pénales pour régler le partage. Aujourd’hui, il nous en manque plus de 120 simplement pour faire face au stock actuel de 220 affaires à juger », a-t-il souligné, précisant que pour faire face à ce flux, il faut ainsi monopoliser davantage d’audiences, de magistrats, de greffiers et de locaux.

Rappelons que pour assurer un traitement plus rapide des affaires pénales et limiter la correctionnalisation, la loi de programmation et de réforme de la justice de 2019 avait prévu l’expérimentation, pendant trois ans, des Cours pénales départementales (CCD), composées de cinq magistrats, pour le prononcé des peines. en première instance des majeurs accusés d’un crime passible de 15 ou 20 ans de prison. Au total, 15 départements pilotes ont été désignés, dont les Yvelines. Enfin, la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire avait prolongé l’expérimentation durant l’année 2022, consacrant la généralisation des CCD à l’ensemble du territoire national à partir du 1er janvier 2023. Une généralisation qui a fait l’objet de vives critiques ces derniers mois, a partagé par Marc Cimamonti : « La généralisation des juridictions pénales appelle de notre part des réserves dans la mesure où elles utilisent plus de magistrats qu’un tribunal auxiliaire, sans compter que les délais d’audience plus courts – 6 mois contre un an – des dossiers avec prévenus sont impossibles à détenir et requérir le renvoi systématique à la chambre de l’instruction. »

Gros problèmes d’inventaire au sein du service de sécurité publique de la police

Autre thème au cœur des préoccupations de la cour d’appel de Versailles : celui de la police judiciaire, avec la question des parts dans les services d’enquête au sein du ressort. Sur plus de 300 000 procédures en cours, 283 000 relèvent des services de sécurité publique de la police nationale, dont 53 % depuis plus d’un an, et 31 % depuis plus de deux ans. Alors qu’il y a 20 à 37 procédures en moyenne par officier de police judiciaire (OPJ) pour les groupements de gendarmerie sous juridiction, les conditions sont « sensiblement plus élevées » pour les services de sécurité publique de la police nationale (commissariats), a souligné le procureur général, atteignant même le nombre de 560 procédures par agent à la Direction Territoriale de la Sûreté Locale des Hauts-de-Seine (DTSP 92).

Si des facteurs secondaires peuvent être aggravants (complexité procédurale, rallongement des délais de prescription, etc.), pour Marc Cimamonti, le premier lien de causalité est le manque d’enquêteurs, et plus précisément l’OPJ : c’est donc au sein des services de la Sûreté Publique de la Police Nationale que le problème des stocks doit être traité par le ministère de l’Intérieur. « Il ne sert à rien d’envisager leur fusion avec la police judiciaire d’aujourd’hui, sauf à prendre le risque de se désarmer judiciairement dans le traitement de la criminalité grave ou organisée », a-t-il ajouté, reflétant la réforme menée par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

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Des services sous tension face à l’explosion des violences conjugales

Au niveau national, le procureur général a mis en garde contre l’état de tension au sein des services pénaux généraux des juridictions de jugement dans le contexte de l’explosion des affaires de violences familiales, et surtout de violences conjugales. En effet, les statistiques de novembre 2022 produites par la Direction des affaires criminelles et l’Observatoire des violences conjugales révèlent une augmentation de 70% des affaires judiciaires en cinq ans, et un recours privilégié aux renvois aux poursuites avec la mise en place de mesures privatives ou limitatives de liberté après garde à vue, ainsi que de graves répressions, notamment lors de la détention définitive.

« La finalité de cette approche répressive se développe dans un sens préventif : il ne s’agit plus de réparer un acte antérieur, mais d’empêcher le renouvellement de l’infraction ou la commission d’une nouvelle infraction. magistrats, enquêteurs, conseillers de placement et de surveillance qui ont été sollicités par la suite », s’est inquiété le procureur général. « Ce n’est pas sain car pour des raisons purement subjectives par considération de responsabilité personnelle, cela affecte le traitement judiciaire qui doit être totalement objectif et impartial. « 

Par ailleurs, Marc Cimamonti a dénoncé les effets « déstabilisateurs » de la multiplication des contentieux des violences conjugales sur l’organisation et le fonctionnement des juridictions. « La création de circuits de poursuites prioritaires au sein de services déjà sous pression compromet le traitement d’autres contentieux qui sont reportés voire négligés », a-t-il critiqué, avant de mentionner que les audiences de condamnation étaient insuffisantes pour traiter les différents contentieux de la prise en charge « de manière appropriée « .

Surpopulation dans les prisons : le législateur invité à intervenir

Enfin, Marc Cimamonti est revenu sur le serpent de mer de la surpopulation carcérale, qui atteint désormais des « niveaux historiques », avec un taux d’occupation moyen de 137%. « La juridiction de la cour d’appel de Versailles est fortement concernée même si nous ne nous excusons pas pour un matelas par terre », a déclaré le procureur général. La situation est particulièrement critique à la maison d’arrêt de Nanterre, avec un taux d’occupation de 164 % et pas moins de 43 cellules triples.

Pour le magistrat, la solution post-Etats généraux de justice de construire davantage de places de prison « n’offre pas de perspectives concrètes d’amélioration à court terme de ces situations inacceptables ». De plus, selon lui, le processus de décision judiciaire individualisé ne résoudra pas définitivement le problème du nombre de détenus. « Cet effort d’urgence ne devrait-il pas être avant tout une affaire politique ? », a demandé – rhétoriquement – Marc Cimamonti, qui suggère de recourir à « des textes juridiques généraux pour la réduction des peines dont l’impact sur les courtes détentions qui restent à subir serait immédiat et significatif sans l’intervention du juge ».

Le plan d’action justice, un « chantier » qui réussira sous conditions

Face à une justice plus que jamais en crise, le plan d’action annoncé le 5 janvier par Selene’s Keeper promet une « réponse globale et solide au diagnostic précité », a estimé Jean-François Beynel. Ce plan prévoit notamment la création de 1 500 postes de magistrats et 1 500 postes de commis d’ici 2027, pour porter à terme le budget du ministère de la Justice à 11 milliards d’euros, et revoir l’organisation des structures de gestion. et l’administration de la justice et des tribunaux.

De l’avis du premier président, ce « grand projet » ne peut véritablement aboutir qu’à des conditions, notamment de pérennité des obligations de l’Etat, « qui doivent être inaugurées » par une nouvelle loi de programmation, et dont la mise en oeuvre « doit être permanente et continue », a-t-il ajouté. m’a dit. « Le mal est grand : il faudra du temps, de l’endurance et de la patience. Le sujet demande de s’affranchir des aléas des changements d’équipe, des aléas de l’actualité, des lois des circonstances, des déclarations sensationnelles, des plans successifs et erratiques. Le sujet demande une stabilité législative, une évaluation régulière et progressive sur une base constante, une adaptation et, surtout, une grande humilité et une grande patience. »

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Jean-François Beynel a également exprimé la volonté de « respect mutuel », clin d’œil à la méfiance qui s’aggrave entre les institutions, estimant que si la justice doit respecter la politique et son action démocratique, elle doit aussi être respectée dans son rôle. « Trop souvent, la justice est accusée de ne pas respecter le rôle du législatif ou de l’exécutif, surtout lorsque le juge fait prévaloir la norme européenne sur la norme nationale. Et pourtant le juge ne respecte que la volonté du peuple souverain qui l’a voulue. donc en ratifiant les conventions et les textes européens. De plus, le juge peut être à la fois rendu responsable de l’insécurité et du laxisme et aussi responsable de la surpopulation carcérale », a-t-il argumenté.

Développer le métier d’arbitre

Surtout, a souligné le premier président, le plan d’action pour la justice ne peut atteindre ses objectifs sans une forte mobilisation des magistrats. D’abord, parce que l’augmentation des fonds publics se traduira par une comptabilité plus claire et plus directe de leur activité. A ce titre, le premier président propose de consacrer régulièrement des conseils de juridiction « publics, ouverts, réunissant tous les acteurs ». D’autre part, a-t-il dit, l’augmentation des effectifs doit les amener à réfléchir sur le lieu de l’audience, le travail en équipe, les modalités de formulation des décisions, mais aussi à repenser leurs méthodes de travail, les processus décisionnels et l’exercice de leur fonction. . « L’arrivée prochaine de nouveaux collaborateurs, les avocats assistants, nécessite une évolution du métier de juge, moins artisan et plus animateur », a plaidé Jean-François Beynel.

Marc Cimamonti a pour sa part spécifiquement demandé la refonte des fonctions du procureur général qui, malgré une « grande variété potentielle », comporte avant tout « une dimension administrative caractérisée par un tropisme de dépendance étroite à l’administration centrale ». Cette dimension administrative « très accablante », comme la gestion des boîtes aux lettres, expose les huissiers de justice « à un risque d’être éloignés des activités judiciaires opérationnelles ». Le procureur a également interrogé le premier président/procureur de la diarchie, qui doit faire l’objet d’une réflexion afin d’être pratiqué « de la meilleure des manières ». « S’il y a un cadre commun et que le procureur général ne peut concéder au premier président qu’un leadership administratif comprenant des services multiples et variés, la fonction judiciaire du procureur général est plus intense que son homologue au siège », a-t-il expliqué.

Vers des juridictions plus attractives

Cette évolution est d’autant plus nécessaire que le métier n’inspire plus vraiment. Le premier président s’est également inquiété du « peu d’appétit » des jeunes pour le service public, lié aux bas salaires, à la perte de valeur liée à la pérennité des emplois, au manque de diversité et d’attractivité dans l’organisation du travail. « A l’heure où les notions de co-développement sont fortement poussées, les services publics sont encore beaucoup trop ancrés dans des notions d’organisations verticales et très anxiogènes », a dénoncé Jean-François Beynel. « Nous sommes face à des enjeux clairs : avoir une rémunération à la hauteur des enjeux, assurer un recrutement dans la diversité, laisser place à l’initiative, au travail d’équipe et à la solidarité », a-t-il résumé.

En matière de recrutement notamment, le premier président souhaite y inclure « une très large ouverture aux compétences extérieures ». « Nous devons accueillir plus facilement et sans crainte des personnes d’horizons différents dans la magistrature. Les méthodes de sélection et de recrutement doivent être accélérées, facilitées et doivent prendre en compte la recherche de la diversité et de l’égalité. La cour d’appel de Versailles a ainsi noué une collaboration avec l’université de Nanterre en proposant des stages longs avec des tuteurs aux étudiants de l’académie de droit, et signera prochainement une convention de partenariat avec l’association La Courte Skala, qui œuvre pour l’égalité des chances. « L’orientation, le suivi individualisé, l’attention aux conditions matérielles de logement, l’écoute des difficultés sont les devoirs des managers envers nos jeunes collègues », a-t-il plaidé.

Et si Jean-François Beynel tenait à voir du positif en pleine crise, la fin de la concertation a aussi été marquée par un joyeux événement : la remise – et c’est une première ! – de la Médaille d’Honneur à la Magistrature, niveau or, à un agent de sécurité pour « acte de courage ». Dimitri Tchouani avait en effet empêché la fuite d’un prévenu l’été dernier en bloquant son corps, « au péril de sa vie », a souligné le premier président. Une récompense suivie de vifs applaudissements de tout le public. Quelle façon facile de terminer une matinée bien remplie !

Crédit photo : Cour d’Appel de Versailles